Parce que le Canada, et en particulier le Québec, n’importent plus autant de portos qu’il y a 15 ans, parce qu’on en consomme certes moins qu’il y a 15 ans, j’entends parler de mode. Le Porto n’est plus à la mode ! Quelle aberration ! S’il y a bien un vin qui est en dehors des tendances, c’est bien le Porto. Depuis trois siècles qu’il existe, il a connu des hauts et des bas selon les époques et pourtant, il est toujours là : noir ou ambré, riche ou soyeux, fruité ou oxydatif; il est le vin intemporel par excellence. 3 articles paraîtront sur ce site avant le 31 décembre 2020 au sujet du Porto : je survolerai d’abord son actualité en suggérant des valeurs sûres de toutes ses catégories; le deuxième article présentera le Porto blanc qui vit actuellement une vraie renaissance; et le troisième article sera consacré aux accords culinaires que les portos peuvent offrir…
Avec les demi-bouteilles, il y a une centaine de bouteilles de Porto de 750 ml à l’heure actuelle sur le marché du Québec, réparties en une vingtaine de marques.
Dans le volume, comme dans la diversité de ces dernières, c’est 4 fois moins qu’il y a 15 ans !!
Le Québec était le premier consommateur de Porto au Canada entre 2000 et 2010, qui était le deuxième pays dans le monde à importer la plus grosse quantité de portos, dits de haut de gamme, soient les tawnies et les vintages.
Bref, on peut dire que le Québec d’alors, était le troisième amateur de Porto de prestige au monde après la Grande-Bretagne et le Portugal !
Le consommateur actuel délaisse les vins moelleux, liquoreux, mutés. La tendance est au sans sucre, au sec, au brut, au non dosé, dit-on… Un sacré paradoxe lorsqu’on analyse le taux de sucre des vins secs les plus vendus dans nos sociétés contemporaines qui, de plus, vivent à l’heure des cocktails en tout genre !
Je ne vais pas le nier, le Porto a été éconduit pour plusieurs raisons depuis 20 ans, des raisons liées aux modes de vie et aux modes de consommation qui ont été bousculées : son taux de sucre élevé, son degré d’alcool élevé et son image désuète.
Par ailleurs, c’est lui, le Porto, qui a fait connaître les vins secs du Douro qui ont, en quelque sorte, pris sa place d’ambassadeur de la région éponyme et je crois que c’est grâce à eux, que le Porto, aujourd’hui, va vivre une renaissance dans la décennie qui s’ouvre.
Quelle que soient les opinions, on ne peut contester que le Porto a gardé son magnétisme odoriférant auprès de tous les consommateurs. Il reste le seul vin au monde à offrir toute la gamme des arômes possibles et imaginables, selon la catégorie qu’on dégustera.
Et cette caractéristique vous permet une chose unique : remonter dans le temps – le vieux rêve de l’homme – à travers des parfums qui vous rappellent votre enfance, un souvenir, un lieu, un moment, une rencontre…
Depuis les fruits jusqu’aux épices en passant par les effluves les plus curieux ou les plus rares, le Porto est sans doute le seul vin au monde à offrir de façon aussi intense et reconnaissable, tous les arômes que vous lirez sur une roue des saveurs de tous les vins, de tous les alcools !
Et puis…
Vous en connaissez beaucoup des vins dont le nom propre est devenu un nom commun ?
Le Porto est le premier.
Voici une courte sélection de portos particulièrement accessibles dans leur catégorie qui vous transporteront dans une multitude saveurs :
FEIST
Fondée à Londres en 1836 par les frères Feist (d’origine allemande), la marque Feist appartient depuis les années 1930 au groupe Barros Almeida. Elle offre de jolis portos de type tawny et colheita dans un style souple, léger, toujours accessible. Comme leur tarif !
Feist – Colheita 1998 – 36 $ en SAQ :
Aucun vin ne peut offrir une plongée dans le temps à ce prix !
Et côté parfums qui s’épanouissent dans une texture soyeuse et longue, on se noie dans ceux d’écorces d’oranges, d’abricots secs, de noix, de grué de cacao, de cannelle et de nougat qu’un simple carré de chocolat noir saura accompagner à merveille.
KOPKE
La marque Kopke, reconnue comme la plus ancienne des Vins de Porto (1658), a possédé autrefois la Quinta de Roriz.
Kopke – Tawny 30 ans – 99 $ en SAQ :
Le cadeau de Noël par excellence ! Il n’y a que 3 portos de cette catégorie en SAQ, le Kopke est le plus délicat et le plus long en bouche, bienvenue dans l’univers de la torréfaction.
OFFLEY FORRESTER
Le britannique William Offley s’était installé en tant que marchand de vin à Porto en 1737 et en 1803, l’écossais Joseph Forrester devint partenaire de la maison et y envoya son neveu Joseph James Forrester en 1831 pour s’occuper des affaires de la famille.
Offley – Tawny 30 ans – 97,75 $ en SAQ :
Suave et capiteux, on passe par tous les stades aromatiques envoûtants des vieux Vins de Porto, de la cassonade aux épices en passant par les écorces d’agrumes confites et le vernis à ongles. C’est un vin pénétrant et complexe, à boire sans accompagnement.
SANDEMAN
Fondée en 1790 par George Sandeman, l’histoire de cette société est liée à l’histoire de l’Espagne et du Portugal. Et c’est toujours un Sandeman à la tête de la maison !
Sandeman – Vintage 2001 – 25,75 $ en SAQ :
Même au Portugal, on ne trouve plus ce Porto ! Un Vintage qui a bientôt 20 ans pour ce prix n’est pas une aubaine, c’est une erreur commerciale ! Profitons-en !
De la soie et des notes de tabac autour d’un boisé délicat qu’on pourra découvrir avec une joue de boeuf braisée, parce que oui, certains portos se révèlent aussi à table ! On verra cela dans un prochain article…
FERREIRA
L’histoire de cette maison fondée en 1751 par José Ferreira se confond à celle de la région toute entière ! C’est Antònia Adelaide Ferreira, son arrière-petite-fille, qui va porter la marque au Panthéon du Vin de Porto à l’instar de Nicole-Barbe Ponsardin en Champagne.
Ferreira – Tawny – Dona Antonia – 19,95 $ en SAQ :
C’est un grand classique de la marque et il est toujours aussi agréable à boire grâce à un volume léger, fait de tanins veloutés qui tapissent la bouche. Sa finale généreuse permet la persistance des arômes de fruits rouges cuits. Un must pour s’initier au tawny…
RAMOS PINTO
Une famille emblématique du Douro dont les anecdotes historiques ne se comptent plus. Les frères Ramos-Pinto ont notamment acheté, en 1919, deux domaines : la Quinta da Urtiga et la Quinta do Bom Retiro. Cette dernière fut la première de la région à avoir une piscine.
Ramos Pinto – Porto blanc – Lagrima – 22 $ en SAQ :
Le genre de bouteille qu’on a chez soi en permanence et qui peut rester entamée pendant plusieurs semaines sans que le temps ne vienne la corrompre. Agrumes confits, zestes de mandarines et notes de miel dans une fluidité veloutée sauront toujours satisfaire l’invité surprise à l’heure de l’apéritif avec quelques amandes salées ou en sortie de table avec un morceau de vieux cheddar.
TAYLOR FLADGATE
Éternellement lié aux grands Vins de Porto, la société existe depuis 1692 mais, le nom Taylor n’apparaît qu’en 1816 et l’identité actuelle Taylor, Fladgate & Yeatman ne date que de 1844. L’endurance des portos Taylor est exceptionnelle.
Taylor Fladgate – Porto blanc – Chip Dry – 22,45 $ en SAQ :
C’est vif, c’est frais, presque sec, axé sur les agrumes, idéal en cocktail avec un tonic, impeccable tout seul aussi, sur glace, avec quelques crevettes en tempura à l’apéritif et étonnamment adéquat en dessert avec une tarte au citron.
NIEPOORT
La maison fut fondée par Eduard Kebe en 1842 et il prit un certain F.M. van der Niepoort comme associé cinq plus tard. À la mort de ce premier en 1858, la maison prît le nom définitif de Niepoort et depuis, elle est transmise de père en fils.
Niepoort – Vintage 2015 – 102,25 $ en SAQ :
Serré, encore gras, concentré sans être lourd, ce Porto encore jeune peut courir jusque 2040, toutefois aujourd’hui, vous saurez apprécier ses arômes de mûres, de cerises griottes et de poivres. Et avec une viande rouge grillée, si vous le testez dès aujourd’hui, l’accord est aussi gourmand que surprenant !
GRAHAM’S
C’est en acceptant d’être payé avec 27 pipes (tonneaux) de Vin de Porto que William et John Graham, deux écossais établis dans le commerce du textile depuis 1820, comprirent qu’il y avait davantage de profits à faire en vendant du vin plutôt que de la laine car, une fois ces fûts facilement revendus, il se lancèrent uniquement et définitivement dans ce nouveau commerce en 1826.
Graham’s – Six Grapes – 24,10 $ en SAQ :
Dans le style de la maison, à la fois puissant et serré, c’est un vin qui pourrait se comparer à certains types LBV s’il ne gardait pas régulièrement cette touche florale élégante et fraîche. Un incontournable de l’appellation.
POÇAS
La même famille aux commandes depuis un siècle dans le Douro, aussi humble que ses vins secs et mutés sont somptueux.
Poças – LBV 2013 Junior – 24,15 $ en SAQ :
Le meilleur Late Bottled Vintage au dessous de 25 $ actuellement au Québec. Fruit rouges et noirs, tanins veloutés, puissance contenue, une caresse juste assez sucrée sur vos papilles pour mieux apprécier un carré de chocolat noir ou un fromage bleu de votre choix.