Trop de champagnes rosés ne sont que des blancs colorés, élaborés davantage pour les yeux que pour la bouche. Même glissés parmi des blancs dans les dégustations à l’aveugle, certains ne se démarquent pas. Les champagnes rosés qui se distinguent sont davantage ceux des récoltants que ceux des négociants. Toutefois, celui que je vous présente ici s’est posé en objecteur, reléguant peut-être mon analyse dans un tiroir… de sagesse ! Le Femme 2007 de Duval-Leroy est un électron libre et surtout, surtout, il m’a séduit parce que c’est un rosé à l’image des deux femmes qui sont derrière lui : solides, posées, établies.
Ces deux femmes se nomment Carol Duval-Leroy, propriétaire de la marque éponyme, et Sandrine Logette-Jardin, chef de cave de cette maison.
Ensemble, elles construisent depuis plus de 25 ans, une gamme riche et précise qui, même si je pense que cette diversité peut dérouter le consommateur d’un point de vue commercial, témoigne de la mosaïque du terroir champenois – aussi varié que le Bourguignon voisin – qui n’a jamais été autant révélé depuis la dernière décennie, notamment par des récoltants inspirés et créatifs.
La Champagne a vendu du champagne sans parler de son terroir pendant 100 ans, elle vend aujourd’hui son terroir en parlant de champagne.
Duval-Leroy fait partie des rares marques qui suivent ce mouvement, logiquement initié et défendu par les récoltants.
Commentaire de la cuvée Femme 2007 Rosé Brut de Duval-Leroy :
Le couleur est orangée, intense; elle pourrait conditionner l’analyse olfactive et elle le fait, car ce champagne expose des notes de cognac et d’orangettes. Toutefois, après avoir laissé le verre s’aérer quelques minutes pour mieux y retourner, en rejetant cette influence visuelle, les parfums d’eau-de-vie et d’agrumes macérés se confirment.
En bouche, une vinosité presque bouzillonne s’installe : nette, énergique, rougeoyante, voire tannique. Elle est enveloppée par une fraîcheur d’agrumes pointue, celle de clémentines, de zestes de clémentines.
Le cacao initialement perçu (orangettes) revient en finale, il indique l’âge du vin, le temps qui l’a façonné. C’est une sensation de torréfaction subtile.
Pas d’oxydation ou d’oxydatif en vue, juste quelques amers qui font les grands champagnes et cette puissance présente, mais contenue, intégrée, qui parcourt toute la dégustation.
On n’est plus dans l’univers du champagne, des bulles frivoles qui animent une texture, on est bien dans l’univers du vin, du grand vin de Champagne, ambassadeur d’un terroir.
À la fois énorme et somptueux, ce Femme Rosé de Saignée 2007 est un détour à faire… et à refaire, et à refaire.