Frédéric Panaïotis, chef de cave de la célèbre maison de champagne, était le premier invité de cette 13ème édition caritative. Il a dressé brièvement l’histoire de la marque, son actualité et ses projets, avant de présenter les cuvées que je vous commente ici:

Fondée en 1729 par Nicolas Ruinart sous les encouragements de
son oncle Dom Thierry Ruinart, Ruinart est la plus ancienne maison
négociante de champagne. Ses crayères où dorment les millions
de bouteilles avant leur commercialisation sont parmi les plus anciennes
et les plus reconnues de la ville de Reims. 

Ruinart possède
17 hectares en propriété, 90 % du vin est issu d’approvisionnement,
acheté aux récoltants. La futaille n’intervient pas dans l’élaboration
des champagnes de la maison, les vins de réserve ne dépassent
guère trois ans d’âge. La tension est avant tout la qualité première des cuvées. 
Quant à la notion de dosage dont le faible niveau est à la mode , Frédéric Panaïotis n’a pas hésité à dire qu’un "champagne de qualité n’est pas celui qui à un faible dosage, mais celui dont on ne sent pas le dosage qu’il soit bas ou élevé au sein de la catégorie Brut".
Et la cuvée Dom Ruinart ? Elle est un hommage des administrateurs de la maison dans les années 1950 au moine bénédictin qui, 230 années après la création de celle-ci, ont créé une cuvée de prestige qui porte son nom (premier millésime blanc: 1959, premier millésime rosé: 1966). 

À noter que depuis 2010, les cuvées déclarées Dom Ruinart sont bouchées en liège et non en capsule pour la seconde fermentation.

R de Ruinart

Délicat au nez par des notes de viennoiseries (croissant, pain au
lait) qui couvrent celles d’agrumes, il s’exprime avantageusement
en bouche grâce à une effervescence enveloppante qui transporte
des effluves plus imposants de fruits blancs cuits (poires, pommes,
 pêches). Le pinot meunier a été réintroduit dernièrement dans
cette cuvée, il apporte un bouquet plus expressif, toutefois, c’est
un champagne peu corsé, voire léger, qui permet une polyvalence
dans les harmonies culinaires, depuis l’apéritif jusqu’au dessert,
selon les goûts.

Blanc de Blancs – Brut

Très subtil dans ses arômes d’abord anisés qui enrobent ceux de
fleurs printanières (muguet, lilas) qu’on décèle au nez, il présente
 en bouche la sobriété du style de la maison : une mousse
abondante, toutefois aérienne, qui s’illustre dans un volume
gonflé et léger. Pur, minéral, légèrement iodé, quelques notes de
 gingembre et de peaux d’agrumes apportent de l’originalité, c’est
un champagne qui accroche par son élégance et sa volupté, et
ses accents presque vanillés après plusieurs minutes dans le verre,
qui charment définitivement le consommateur.

Rosé – Brut

Surprenant par sa simplicité, sa droiture, sa structure légère, ce
champagne a tout de la fraise à l’eau orangée : sa couleur, ses
flaveurs et pourtant, il n’est pas mono-aromatique, car on décèle
des accents très frais de rosée du matin, de fleurs de cerisier qui illustrent une énergie contrôlée. Sans grande vinosité, c’est un champagne
élégant et léger, avec une pointe balsamique en finale, dans le
 style de la maison, toutefois moins imposant dans le volume que
les autres cuvées.

Dom Ruinart 2004 – Brut – Blanc de Blancs

Superbe nez expressif de viennoiseries avec une note de chouquette très marquée (pâte à choux et sucre) qu’on retrouve en bouche un brin toastée et qui fait penser à un grand Chablis d’une dizaine d’années. La texture est fondante grâce aux bulles bien nouées, l’enveloppe présente une acidité adolescente qui rappelle la fraîcheur de la région. C’est un champagne déjà exquis que les amateurs de champagne à la vinosité plus marquée et aux arômes plus beurrés pourront attendre jusque 2018. 

Dom Ruinart 1998 – Brut – Blanc de Blancs

J’avais dégusté cette cuvée en février 2012 et voici ce que j’écrivais alors (Guide Revel 2013): Un léger rancio
s’en dégage logiquement, mais la minéralité est toujours présente
(craie, iode, très subtil) pour être rapidement occultée par
des accents de tilleul, de fruits confits qui rappelle les grands
vins blancs de Bourgogne qui ont une dizaine d’années. L’effervescence confirme cette maturité, elle abonde
dans un volume ramassé et l’illustre par des bulles finement
nouées. Un vin exquis pour un grand repas. 
Voici ce que je perçois aujourd’hui: toujours taillé pour la table et un service de plat onctueux, le nez est plus fermé, toujours aussi pâtissier, mais plus torréfié (effet du millésime). Je suis étonné par la fraîcheur toujours présente dans le comportement du vin en bouche, dans son enveloppe qui rappelle des zestes de mandarines. Il semble dans une seconde jeunesse, la minéralité occulterait presque les notes beurrées. C’est un champagne qui charme par ses arômes particulièrement persistants, je le préconise sur un plat de volaille aux champignons.

Dom Ruinart Rosé – Brut 2002

Nez discret de fleurs fânées et de zestes qu’on perçoit en bouche avec une touche épicée. Ferme en bouche, la texture se contracte, les bulles sont serrées, l’ensemble présente une fine vinosité. Il semble toutefois en sommeil, il est moins expansif que les blancs de la maison. Le millésime confirme sa qualité, c’est un vin endurant qui devrait se livrer davantage vers 2018. Soyons patient…

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