En ce début de mois de décembre 2021, les 800 employés travaillant aux entrepôts de la SAQ ont rejeté l’entente de principe, malgré son acceptation par la section locale du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), affilié à la FTQ.
Puisque ce sont ces employés qui ravitaillent les succursales et les restaurants, c’est au bout du compte le consommateur qui est pris en otage; certaines succursales ne présentant que 25 % de leur approvisionnement habituellement en vente sur leurs tablettes !
Et l’on reparle donc de la pertinence de notre système de vente des alcools au pays…
Privatisation ou monopole ?
Le débat est constant, brûlant actuellement, avec cette grève à la veille de Noël.
Je n’étalerai pas ici une liste comparative de chiffres et de pourcentages qu’on peut faire « parler », de toute façon, selon qu’on défende ou qu’on dénonce le monopole.
Certains de mes collègues le font mieux que moi, je préfère leur laisser le loisir mathématique d’écrire sur le sujet.
Je constate seulement que les privilèges, les abus et les menaces déguisées ont changé de rang social : ils étaient autrefois un acquis de l’aristocratie régnante et du clergé, ils sont aujourd’hui ceux des fonctionnaires et de leurs syndicats, qu’elle que soit la profession.
Et lorsqu’on observe depuis 2 ans, les conditions salariales et de travail des personnels de la santé ou de l’éducation publique – par exemple – je me dis qu’il y a des employés nombrilistes de la SAQ qui tirent un peu trop sur la ficelle, à l’instar de sa haute direction qui prend des décisions commerciales arbitraires, paradoxales au regard du pouvoir d’achat déclinant des Québécois.
J’énonce donc, ci-dessous, des vérités pragmatiques que le consommateur Québécois ignore parfois.
C’est au lecteur d’en tirer une opinion, de peser le pour et le contre, en toutes connaissances de notre système et surtout, des autres systèmes de vente d’alcools dans le monde, souvent idéalisés.
Une réforme de notre monopole est nécessaire, désormais urgente, car la ficelle va casser à un bout ou à l’autre, et les dégâts auront des répercussions dans toutes les sphères de la société québécoise.
Avantages/atouts ou inconvénients/embarras, les voici présentés pour les 3 principaux acteurs de la filière : le producteur, le consommateur et le monopole.
POUR LE PRODUCTEUR :
Les avantages:
La garantie de paiement (des producteurs attendent 6 mois à un an avant d’être payés ou ne le seront jamais en envoyant leur vin dans certains pays).
L’analyse scientifique de son produit par un laboratoire reconnu internationalement (beaucoup de vignerons utilisent les résultats d’analyse pour percer d’autres marchés exigeants dans le monde).
La fiabilité du réseau de distribution.
La visibilité de son produit au sein des succursales.
L’équitabilité de la visibilité du produit par rapport à un autre, selon des normes claires et contrôlées.
La fierté d’être sur un marché de qualité reconnu dans le monde entier (référence de qualité).
Les embarras:
Le délai d’admissibilité de son vin.
Le coût élevé d’admissibilité.
La bureaucratie exigeante et lourde.
Les critères de sélections de produits contradictoires : popularité dans des guides étrangers ou des références impérialistes, éloignées de la culture du Québec / nécessité d’investissements publicitaires contraignantes.
Les justifications de refus de produit plus opaques que transparentes, rarement précises et pertinentes.
Les « règles du jeu du monopole » sont changées régulièrement en fonction du déroulement de l’économie mondiale.
POUR LE CONSOMMATEUR:
Les avantages :
La garantie sanitaire (vérification scientifique de tous les produits) et l’absence de contrefaçons (en succursales).
Le remboursement ou l’échange des bouteilles défectueuses (unique au monde).
La plus grosse distribution d’un même produit dans plus de 150 succursales au Québec, soit sur une surface dite commerciale, inégalée dans le monde.
Le plus grand choix d’appellations de vins et d’alcools au monde (25 000 références en incluant les importations privées, toujours contrôlées par la SAQ).
La qualité du service en succursale (visibilité, orientation, distinction, personnel instruit « autant que faire se peut »).
La tarification identique et contrôlée d’un même produit dans toutes les succursales (c’est le principe d’un monopole).
L’achat en ligne (internet et téléphone intelligent).
L’information en succursale et en ligne sur la disponibilité des produits.
Le tarif des vins au-dessus de 30 $ globalement identique à celui du pays d’origine.
Le tarif des vins au-dessus de 100 $ généralement inférieur à celui du pays d’origine.
Les embarras:
Le tarif des vins en dessous de 20 $ globalement plus élevé de 25 % comparativement aux autres marchés d’Amérique du Nord.
Le tarif des vins en dessous de 20 $ globalement plus élevé de 35 % comparativement aux marchés de leur pays d’origine.
POUR L’ÉTAT (La SAQ) :
Les avantages:
Il offre un travail salarié et syndicalement protégé au citoyen du Québec, à la rémunération et aux avantages confortables, comparativement à d’autres emplois de la fonction publique.
Il redistribue une partie des profits du monopole à d’autres ministères à des fins de réinvestissement.
Il participe à des causes caritatives majeures.
Il est libre de changer « ses règles du jeu » à tout moment.
Il négocie, vérifie, corrige et embouteille lui-même un volume de vin conséquent et le distribue hors de ses succursales (entre 100 et 150 étiquettes différentes) dont les revenus représentent plus ou moins 1/3 de son chiffre d’affaire annuel : un gros avantage pour l’état.
Les embarras :
L’opacité de l’information envers le citoyen au sujet du fonctionnement du système : on peut supposer qu’en dehors des employés de la SAQ (et encore…), 85 % de la population du Québec ne sait pas comment fonctionne la SAQ.
Le citoyen confond le rôle de la SAQ et les obligations de la Régie des Alcools, des Courses et des Jeux du Québec : c’est souvent « la faute de la SAQ » alors qu’il s’agit d’un problème lié à la RACJQ.
Il négocie, vérifie, corrige et embouteille lui-même un volume de vin conséquent et le distribue hors de ses succursales sur un marché privé, donc non monopolistique (entre 100 et 150 étiquettes différentes) dont les revenus représentent plus ou moins 1/3 de son chiffre d’affaire annuel : un gros embarras pour l’état, car contradictoire à la notion de monopole.