« Pour moi, vendre un tonneau pour du vin, de la bière ou pour de l’alcool, c’est la même chose. Je suis avant tout tonnelier. Je vais évidemment adapter mon travail aux demandes du client et de sa profession, mais ce qui surprend les gens, c’est que je ne vends pas de barrique aux vignerons du Québec. »

En effet… 
Et c’est pour
cette raison que je suis allé à la rencontre de Pascal Plamondon qui a installé
sa tonnellerie en 2007 à Saint-Césaire en Montérégie, au Québec.

  
Ébéniste de
formation, il se spécialise dans la futaille à l’École des Vieux Métiers de
Longueuil  au début des années 2000 parce qu’il possède un milliers de
plants de vignes (marquette et frontenac) dont il vend le raisin à des
vignerons. Toutefois, pendant trois années, il récupère quelques litres de vin
qu’il entrepose dans ses premiers fûts à titre d’essai d’élevage.

  

« Je n’avais
aucune référence en matière de vin et de vinification. J’ai surtout fait du vin
en tant que tonnelier, pour tester mes fûts, pas en tant que vigneron. Il
m’était donc difficile de comparer la qualité d’un vin élevé dans un fût
étranger par rapport à un autre, élevé dans un de mes fûts. Les résultats
étaient probants, du moins en ce qui concerne l’effet du bois et de l’oxygénation
sur le vin. La qualité du vin en tant que telle, ce n’était pas à moi de la
juger. C’est une question de goût après tout. Par contre, j’ai su que mes
barriques étaient fiables »

  

Alors comment
expliquer qu’aucun vigneron du Québec ne tente pas au moins une fois, d’élever
leur vin dans du Plamondon, eux qui revendiquent tellement l’esprit de terroir ?

« Parce
qu’ils préfèrent le fût étranger. » de me répondre Pascal Plamondon.
« L’Américain ou le Français, usager ou neuf, alors qu’il est sans doute plus
cher, rassure. Il est tellement difficile de faire un bon vin au Québec, de
réussir sa vinification, que lorsqu’un vigneron sait que le millésime est
excellent – en gros, une fois tous les 4 ans – il préfèrera l’élever dans un
fût à l’histoire fiable et garantie, un fût qui rassure plutôt qu’un fût créé
au Québec qui représente l’innovation.»

  

Alors comment
fait-on pour vivre de la tonnellerie au Québec quand l’industrie du vin local
se détourne de vous ?

  

« Il y a
l’industrie brassicole. Il y a davantage de patriotisme chez les brasseurs. Je
leur construis des barriques plus petites ou plus grosses, selon les demandes.
Une année pourtant – je vais vous étonner – mon plus gros client a été une
chaîne de supermarchés qui m’a commandé plus de 50 fûts à titre décoratif. Ce
n’est pas la même épaisseur de douelles, mais ça reste un fût aussi bien
travaillé. C’est la confiance qui freine l’achat et ce qui est triste, c’est
que les rares barriques que j’ai vendues à des vignerons locaux, je n’ai jamais
su s’ils en étaient satisfaits ou non. Ils m’achètent des barriques quand ils
sont mal pris, quand la livraison de barriques étrangères dépasse le délai
d’attente d’une vendange à élever. Mon métier est très jeune dans la province,
le leur un peu moins. Nos professions sont connexes et gagnent à évoluer
ensemble. On devrait se serrer les coudes, communiquer entre nous pour toujours
évoluer vers la qualité. J’achète du chêne américain, du chêne français et même
du chêne québécois. C’est le même bois qu’un tonnelier installé hors de la
province. Les provenances et les origines du chêne sont les mêmes pour tout le
métier. Mais il y a plus de fierté à dire qu’un vin a été élevé en fût de chêne
du Tronçais plutôt qu’en fût de chêne du Québec ou qu’il s’agit d’un fût provenant
d’une signature de tonnellerie Française plutôt que de la mienne. 
Mon
entreprise n’a pas 10 ans, ce métier n’est pas facile physiquement parlant et
il est vrai qu’au niveau matériel, je traverse des périodes délicates. Je suis
un peu tributaire des saisons comme mes clients. Toutefois, j’adore ce métier
qui est l’un des plus vieux du monde, comme celui de vigneron. On est proche de
la nature, des éléments, je travaille avec le feu, l’air et l’eau. C’est un
métier qui ressource, un métier inspirant et lorsque je livre des barriques, je
suis fier de mon travail. Tant que je pourrai physiquement continuer, il y aura
des barriques signées Plamondon».

  

En quittant Pascal
Plamondon, je quittai un artisan bien dans sa peau et conscient de la valeur de
son travail, conscient de son métier de compagnon. Et pour le soutenir dans sa
foi du métier au Québec et lui confirmer ses dires au sujet des différentes
signatures de tonneliers dans le monde, je lui contai cette anecdote qui résume
aussi l’enveloppe du marketing commercial de cette profession à l’heure
actuelle: alors que j’étais en tournée dans la Loire il y a 6 ans, je rendis
visite à Louis-Benjamin Daguenau qui venait de perdre son père Didier,
référence mondiale en matière de sauvignon. 

À la question: «que signifie les
lettres DSLS sur vos fûts de chêne ? » Il me répondit : « Dieu
Seul Le Sait
, parce que si tous les fûts qui sont vendus dans le monde
provenaient vraiment du Tronçais ou des Bertranges, y’a longtemps qu’il n’y
aurait plus de chêne dans la Nièvre ou l’Allier. » 
Absit reverentia
vero*…         

*Ne craignons pas
de dire la vérité.

Contact Tonnellerie Plamondon : 450 469-2530

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